La rentrée littéraire de la Fantasy française par Les Indés de l’Imaginaire

 

 

Le collectif  « Les Indés de l’Imaginaire » faisait sa rentrée littéraire ce samedi  5 octobre 2013  à Bordeaux (après Paris et Lyon).

Le rendez-vous était donné à 15h, au 91 rue Porte-Dijeaux (salle de conférence de la librairie Mollat).

J’ai bravé la pluie, le périphérique de Bordeaux, le tramway et j’étais dans la place en avance. Après quelques inquiétudes quand à la venue de Karim Berrouka, qui s’était perdu, la conférence a débuté.

De gauche à droite : 

  • André-François RUAUD, le directeur littéraire des Moutons électriques,
  • Justine NIOGRET, qui présentait son dernier livre MORDRED  
  • Jean-Philippe JAWORSKI,  qui présentait son dernier livre MÊME PAS MORT
  • Karim BERROUKA, qui présentait son premier livre LES BALLONS DIRIGEABLES RÊVENT-ILS DE POUPÉES GONFLABLES ?

 A.-F. Ruaud a animé la conférence. Il est d’abord revenu sur la création des indés de l’imaginaire  « Fin 2012, trois éditeurs indépendants décidaient d’unir leurs forces : ActuSF, Mnémos et les Moutons électriques. » , puis sur l’objectif de cette rentrée littéraire de la Fantasy (mettre en avance la Fantasy à l’occasion de la rentrée littéraire et profiter notamment de la sortie conjointe de 3 fantasy historiques dans les 3 maisons d’éditions). Ce fût ensuite le jeu des questions réponses avec les auteurs.

J.-P. Jaworski a  notamment expliqué qu’il y avait un espace libre pour écrire une trilogie de fantasy celtique. J. Niogret a expliqué que c’était la façon dont les personnages percevaient leur environnement, plutôt que l’inscription précise de l’environnement dans le temps, qui l’intéressait. C’est pour cela que ses romans sont intemporels. Elle est vraiment passionnante comme auteur, par exemple pour écrire sur le travail de forgeron et les épées, elle a passé un hiver à apprendre à forger. Il s’est avéré plus difficile de faire parler K. Berrouka, qui avait l’air de prendre un malin plaisir à ne pas répondre aux question de A.-F. Ruaud.

A la question des débuts d’écriture, les trois auteurs répondront qu’ils ont toujours écrit. Pour J. Niogret et J.-P. Jaworski cela s’est avéré être un échappatoire nécessaire à leur existence. Sur leur projet, ils seront plus ou moins prolixes, K. Berrouka n’en parlea pas, J.-P. Jaworski travaille sur la suite de Même pas mort  (il reviendra au vieux royaumes quand il aura terminé la trilogie celtique) et J. Niogret travaille sur un livre sur les gladiateurs.

Ils parleront également (dans le désordre) de jeux de rôle, d’animaux de compagnie, de critiques (la mère de K. Berrouka a beaucoup aimé son livre)… 

La parole est ensuite passée aux auditeurs. Et là je me suis motivée, une question à J.-P. Jaworski  sur sa passion du vocabulaire et une à J. Niogret pour savoir si elle n’allait pas écrire sur sa propre vie, car à chaque fois qu’elle en parle, cela donne envie de connaître plus d’anecdotes. J’avoue je n’en n’ai pas posé à K. Berrouka, j’avais sans doute trop peur de la réponse. J.-P. Jaworski a donc expliqué que sa passion venait peut-être du fait qu’il était professeur de lettres et qu’il aimait utiliser les mots précis pour chaque chose quand il existe, pour lui cela permet de construire l’ambiance romanesque. J. Niogret n’écrira pas sur notre époque, car elle ne la fait pas vibrer. Dans un texte historique, elle peut parler du chemin que fait son chien, dans le présent, cela la ferait passer pour la doudingue de service et ce n’est pas toujours facile à porter. D’ailleurs on lui a proposé d’écrire une histoire dans notre époque et elle a refusé.

D’autres ont été plus téméraire que mois et ont demandé à K. Berrouka d’où venait la première nouvelle de son anthologie, qui est très différente des autres. Il l’a écrite pour un appel à texte après avoir vu une information sur les djinns. Sur le choix du titre, il a indiqué qu’il lui plaisait et que c’était un hommage à Philippe K. Dick.

Beaucoup de questions ont été posées à J.-P. Jaworski. Pourquoi n’écrivait-il pas tout bonnement des livres historiques ? Ecrire un roman historique, c’est se comparer à la perception des personnages de l’époque, la Fantasy permet d’être plus proche de la perception qu’ont les personnage du monde. Si l’influence de Shakespeare transparaît dans ses romans, c’est qu’il a été imprégné de ses textes à 11 ans (!!! ah oui quand même), il a également été pétri de politique assez ancienne. Sur la comparaison entre romans et jeux, il répondra que dès l’origine le roman est très proche de la mécanique du jeu. J. Niogret précise que l’intérêt avec un roman, c’est qu’il n’y a pas de joueur en train de râler (j’ai froid, j’ai faim), de demander à aller aux toilettes, à appeler leur mère… (J.-P. Jaworski est un orateur passionnant, je crois que je pourrais l’écouter pendant des heures).

Un auditeur a eu la bonne idée de demander des nouvelles des projets des indés de l’imaginaire à A.-F. Ruaud. Pleins de choses sont les starting block : la reprise de la revue fiction, des discussions d’auteurs (J. Niogret et J.-P. Jaworski, K. Berrouka et Morgane Caussarieu (ça promet)), une anthologie d’Utopie inédite et gratuite (pour donner envie de lire le genre), une rentrée littéraire 2014 sur la Science-Fiction, une collection Hélios mise en commun avec de nouveaux titres et des auteurs d’autres catalogues et à partir de 2014 un catalogue commun. Ca promet ! K. Berrouka a précisé qu’il trouvait ça très bien que trois maisons d’édition travaille ensemble alors que d’autres « se bouffent le nez ».

Le temps étaient venu, non pas des rires et des chants, mais des dédicaces.

J.-P. Jaworski était concentré avec de très nombreuses dédicaces à faire, pendant ce temps K. Berrouka racontait des bêtises à J. Niogret.

Je me suis laissée tenter par :

                                      

 

    

ESCALE Photographies : Richard BARON, Textes : Elizabeth GUEURET

Quatrième de couverture : 

« Echelle, escale.Dans la Marine, jusqu’au milieu du XIXe siècle, les deux termes étaient synonymes. Pour avoir la même racine : scala en italien. On pouvait désigner des ports méditerranéens comme des échelles du Levant. Maintenant, on dit seulement escale. Une escale est un lieu où l’on pousse une échelle. »

Richard Baron, photographe, monte à bord par l’échelle de coupée, rencontre les marins de passage, approche leurs regards, leurs attitudes. Elizabeth Gueuret, sociologue, poursuit son étude de la transformation des métiers maritimes et portuaires publiée dans la collection « Long cours » chez Light Motiv. A travers les témoignages des marins, des personnes vouées à leur accueil sur Dunkerque, elle nous parle ici de la transformation du temps de l’escale, un temps de pause devenu progressivement un temps de travail intense.

ESCALE est le cinquième ouvrage de la collection « Long cours ».

 

Grâce à La voie des indés sur Libfly, j’ai pu découvrir cet ouvrage des éditions Light Motiv. Je l’ai choisi  parce que j’aime beaucoup la mer, mais aussi les ports. Pas de fantasy ici, la vie, la vraie.

Mon ressenti :

Ce livre est d’un genre particulier, il allie le texte et les images. Mais les images font partie intégrante de la narration, elles, aussi, parlent et nous narrent l’escale. Elles sont d’ailleurs notre premier contact avec le sujet par la couverture, où figure un escalier, que l’on imagine faire le lien entre le pont et le quai. Le décors est planté. Les photos de Richard Baron vont aussi bien présenter les bateaux, la mer, que les marins. Elles nous plongent dans l’univers de ces hommes fantômes, que l’on ne voit pas à terre car ils ont peu ou pas de temps pour y descendre ou bien parce qu’ils sont cantonnés dans certaines zones. Le photographe a su capté leur essence, hommes un peu effacés, pas vraiment là, ou bien semblant rêver à leur prochain départ. Il nous apporte un témoignage visuel sur le cadre de vie de ces marins, les immenses paquebots, la salle des machines, les zones interdites, la mer… Je trouve ces images à la fois belles et inquiétantes. Quelle place peut trouver l’homme dans cet environnement ?

Le texte d’Elizabeth GUEURET nous narre ce que nous avons pu deviner en partie grâce aux images : les conditions de vie de ces hommes, leurs origines, leur travail… Le texte permet d’aller plus loin et nous donne des billes pour comprend ce qu’est l’escale pour ces hommes toujours en transit. D’un instant jadis plaisant, elles sont maintenant un condensé de contrôles, de travail à faire en peu de temps pour des raisons de productivité. L’auteur nous explique l’évolution des rapports humains entre marins, la technologie a rapproché artificiellement les familles, mais a éloigné les hommes.

J’ai trouvé que textes et images se mêlaient très bien. Ces alternances sont propices au voyage de la pensée, à défaut de voyage en mer.

J’ai particulièrement aimé la photo qui est page 43, il s’agit d’un porte conteneur. On se demande comment il peut flotter tellement il y a de conteneurs. Si j’ai retenu cette image, c’est sans doute parce qu’elle me fait un peu peur en l’imaginant en pleine tempête.

Une citation m’a particulièrement marquée « Et finalement on n’attend qu’une chose, c’est de repartir au large pour pouvoir respirer. » Tout est dit.

Une chose m’a manqué, les légendes pour accompagner les photos. J’aurais aimé connaître le nom de ces hommes, dont l’existence est presque niée, ainsi que les noms des bateaux.

Au final :

Un beau livre qui fait rêver et réfléchir et que l’on se prend à désirer plus gros.

L’épouvantable encyclopédie des fantômes, textes de Pierre Dubois, illustrations de Carine M. et Elian Black’mor

Quatrième de couverture :

Dans les combles de l’au-delà, voyez-vous, quand les ombres s’abandonnent, les douze coups de minuit enfantent des chimères…
Les fantômes parlent peu, mais ils se font comprendre… Il suffit d’être à l’écoute, de s’abandonner à leur rencontre, de recueillir les signes.
C’est un état d’esprits. Peter C.

 

Il y a des craquage parfois, au niveau achat. Ce fût le cas pour cette encyclopédie achetée aux Utopiales en 2012. En plus les auteurs étaient là pour la dédicace! J’ai pris mon temps pour le lire, voulant le savourer et encore plus pour le chroniquer. Difficile d’écrire quand j’ai juste envie de dire : j’aime c’est trop bien, achetez le, lisez le.

 

Mon ressenti :

Dans le prologue Peter C., pneumatologue de son état (pour information la pneumatologie est la science des esprits), nous présente les fantômes, qui sont-ils, où sont-ils, comment les voir. Vous savez immédiatement si le livre va vous plaire ou pas. Les textes sont de Pierre Dubois, son talent de conteur est indéniable et il nous envoûte dès la première page. Ce livre est une encyclopédie, aussi les fantômes vont être détaillés par type (enfance et petites ombres, membres égarés…)., mais le texte ne sera jamais rébarbatif et ne se réduira jamais à un simple catalogue. Bravo M. Dubois! Outre les descriptions plusieurs contes sont présentés, des brefs qui font peur, des moins court et qui font peur aussi et des conte de fantômes NDLR.

Si le texte ne suffisait pas, il  y a les magnifiques illustrations de Carine M. et Elian Black’mor. Pages complètes ou insertions dans le texte, ils rendent les fantômes vivants. Le texte s’anime sous nos yeux et notre imagination est dépassée par les réalisations.

La mise en page de l’encyclopédie est réalisée à merveille : pas une page est blanche, un effet usé est donné à chaque page, les fonds de vieilles tapisseries s’accordent au texte.

Difficile de ne retenir qu’un texte, un petit plus peut-être pour L’ANKOU et la morte pour la conclusion : l’amoureux sauve sa fiancée de l’Ankou et le paye toute sa vie du fait des mœurs légères de son épouse.

J’aime particulièrement l’illustration de la couverture qui représente le fantôme de la veuve Shrimp, ensanglantée à souhait, elle n’en reste pas moins esthétique.

Au final :

Une lecture qui m’a ravit, d’autant plus que j’adore les encyclopédie de mondes ou animaux merveilleux. Et une bonne nouvelle car L’effroyable encyclopédie des revenants devraient paraître en octobre 2014.

Pour vous donner envie :

L’avis de Petitetrölle et de Tigger Lilly

Samedi 19 octobre : Fantômes et cimetières britanniques et irlandais

 

Démons et merveilles de H.P. Lovecraft

Quatrième de couverture :

« Comparé à ces contes, Poe ressemble à de la musique de chambre », a écrit Daniel George. On sait maintenant que Howard Phillips Lovecraft est le premier romancier moderne dans l’ordre du fantastique. Les récits qui composent Démons et merveilles sont autant de voyages hallucinants et angoissés à travers cet inconnu que les découvertes scientifiques modernes n’ont réussi qu’à multiplier.

 

Il y a des auteurs à lire, mais alors à chroniquer… Aïe aïe aïe. Mon premier contact avec Lovecraft date d’il y a 16 ans!!! une rencontre avortée pour cause de frayeurs trop importante. Pour ce deuxième essai j’ai lu Démons et merveilles, un récit présenté comme étant en partie autobiographique.

 

Mon ressenti :

Pour un auteur complètement barré une chronique décousue. Je n’aurais pas aimé être dans la tête de Lovecraft… Il invente un tas de bestioles complètement bizarres et plus effrayante les unes que les autres. Le récit est hallucinatoire. Tout ceci m’a « un peu » perturbée au départ. Je n’étais pas toujours sure d’avoir bien compris ce qui se passait ou ce qui s’était passé. Le texte est découpé en quatre parties qui peuvent être indépendantes, surtout la quatrième d’ailleurs. Le premier texte m’a rappelé mes premières lectures à savoir la découverte de l’occultisme et de monstres terrifiants. Le deuxième et le troisième nous présente une histoire du héros Randolf Carter pas piquée des vers. Enfin la dernière est un voyage dans les rêves du héros, attention Lovecraft nous envoie même sur la lune!

Tout ceci peut sembler abracadabrant, et l’est d’une certaine façon. Mais Lovecraft raconte cela avec tellement de détails et presque de logique, que passée la surprise, le récit se tient et se lit. Ce texte pourrait paraître un peu banal aujourd’hui, mais il ne faut pas oublié qu’il a été écrit entre 1919 et 1933.

Plus que des personnages secondaires il y a de nombreuses bestioles secondaires dans ces récits. Je ne me suis pas attachée à une en particulier, elles sont toute affreuses et présentées comme horrifiantes (en réalité elles ne font pas vraiment peur). Pas de coup de cœur particulier pour le héros non plus, même s’il a quelques bons côté. Il parle chat! Oui oui vous avez bien lu, chat. D’ailleurs il se fait aider par une armée de chat, un des moments du récit que j’ai préféré, c’est juste complètement farfelu.

Au final :

A lire si vous souhaitez faire un voyage halluciné, hallucinant, sans consommer de produits illicites !

N°3 L