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Auteur : Patrick Brisebois –  Editions : Le Quartanier, Série QR – Parution : novembre 2011 – 184  pages – prix : 18 € – genre : contemporain

 

Quatrième de couverture:

Chaque génération répète les erreurs de la précédente, mais chacune vit à sa manière ses peurs profondes. Isidore Malenfant est un écrivain de science-fiction raté. Comme pour son père Théodore, c’est avec les femmes que surviennent ses problèmes. Avec les femmes belles et fantasques, parfois brisées par le chagrin et la folie, avec les filles androgynes et les créatures ambiguës. Il s’installe un temps avec la charnelle Marilyn, mais celle-ci part pour Paris et le laisse seul. Peu à peu, quelque chose s’immisce dans la vie d’Isidore, un visage, une silhouette, alors qu’en kaléidoscope repassent les moments anxiogènes de sa jeunesse. Si c’est à Redfield Park qu’a commencé son histoire, naissance et mort jumelées, pour plus tard se figer à Montréal, c’est par Redfield Park à nouveau qu’elle devra se poursuivre.

 

Quelques mots :

Quand Libfly a mis à l’honneur deux maisons d’édition québécoises, dans le cadre de La voie des indés, j’ai immédiatement été tentée. L’accent québécois me fascine et je ne désespère pas, un jour, d’aller visiter une partie de ce beau pays.

 

Mon avis :

Avec une telle quatrième de couverture, je m’attendais à un roman complètement déjanté. Au final, l’adjectif est même trop léger pour décrire ce livre. Au début, on peut rire en découvrant le personnage d’Isidore, qui est passé maître de l’auto dérision. Il est désœuvré, sans illusion sur la vie. Le lecteur découvre comment il fout sa vie en l’air, sur fond d’ambiance no future éthylique. Mais rapidement cela disparaît pour laisser place à un univers sordide. La suite du livre nous fait découvrir ses parents, son enfance. On découvre une mère pas très stable psychologiquement et un drame familiale qui pourrait expliquer le naufrage d’une famille vaguement équilibrée au départ, un enfant mort né, la jumelle d’Isidore. Mais parfois, on doute, est-ce la réalité qui est décrite ? ou un rêve éveillé ? on ne sait pas. J’en suis venue à me demander, si j’avais affaire à un récit fantastique avec de vraies monstres, ou  uniquement à des représentations fantasmagoriques des démons intérieurs des personnages. Est-ce réel ou pas? On ne le saura jamais, l’auteur ne nous donne pas de réponse. J’ai donc terminé ma lecture, désemparée.

Il faut dire que l’écriture est très particulière et sert parfaitement cette histoire folle. Le début est facilement lisible, mais la deuxième moitié est plus cacophonique. Suivant les chapitres, l’écriture change. On passe d’un récit linéaire, à des textes hallucinés, dont la trame est hachée. Cela m’a rappelé une lecture de William Burroughs, où l’histoire se devine dans un semi-chaos narratif.

Isidore, sacré personnage ! Cela prend du temps, de remettre bout à bout les petits morceaux de son histoire. Une fois ce travail fait, le lecteur comprend l’état de mal-être dans lequel il vit et pourquoi il s’autodétruit. Mais au départ, on ne peut que constater que c’est un raté, un brin nuisible pour les femmes. Il faut dire que ses parents ne sont pas mal non plus, notamment sa mère. Est-elle complètement folle ? Difficile à savoir. Et son père, absent, n’aide pas. Vous l’aurez compris Patrick Brisebois nous dépeint des personnages hauts en couleur.

Pour conclure, si le titre rappel le poème de Friedrich Rückert « Chants pour des enfants morts », je ne pense pas que c’est un hasard. Patrick Brisebois a écrit un livre très sombre, poétique et triste. Le texte est porté par l’écriture, aussi déjantée que ce qui arrive aux personnages, au point, parfois, d’en perdre le lecteur. Une lecture étrange qui laisse des marques.

 

« Le monde s’atrophie, et les gens perdent le sens de la réalité. ils oublient pourquoi ils sont venus au monde. Ils oublient tout. Pourquoi ont-ils peur que plus personne ne les aime ? Quelque chose ne tourne pas rond. Plus le monde tourne, plus tout s’écroule, et plus il y a de pleurs. Il ne faut jamais regarder les gens dans les yeux, ne jamais leur demander leur numéro de téléphone, ne jamais compter sur qui que ce soit. »